La triple anxiété

"La vie de chacun d'entre nous est marquée par une triple anxiété : la peur de la destruction, le désespoir devant l'absurde et la détresse de l'isolement. L'homme cherche donc sans cesse - qu'il le sache ou non - la sécurité, le sens de la vie et l'amour. Il s'aperçoit cependant qu'au-dessus de toute vie il y a la mort, que toute quête du sens du monde échoue devant l'incompréhensible, et que tout amour, accompli dans l'unité avec le "toi", est menacé de finir. L'homme est donc habité par la nostalgie inassouvie, consciente ou non, d'une vie qui soit au-delà de la mort, d'un sens au-delà du sens et du non-sens de ce monde, et d'une protection que rien ne puisse mettre en danger."

K. G. Dürckheim, "méditer"

Guérir c'est finalement accepter de perdre : dans le corps, perdre la santé, l'identité; dans l'esprit, perdre la raison, le sens ; dans le coeur, perdre l'autre, l'amour. Sur le chemin transpersonnel de l'être humain, ce sont des illusions. Des illusions nécessaires bien sûr pour construire un moi suffisamment sain et fort. Mais après ? ce moi est destiné à perdre sa place. Il s'agit vraiment de désespérer et de perdre son moi. Perdre jusqu'à son âme et la retrouver trouée. Ce trou, ce manque est le manque de l'être, de Dieu, du plus vaste. Accepté, il peut devenir un passage pour l'être, pour une complétude. Une complétude éphémère car elle se perd et se retrouve : c'est le mouvement de la vie.

Bernadette Blein et Brigitte Chavas, "Guérir l'ego, révéler l'être" .(p.164)